Little senegal


Rachid Bouchareb dirige Sotigui Kouyaté sur les lieux du tournage de Little Senegal.




La séance du mercredi 28 mai :

Un public assez nombreux est resté jusqu'au bout de la projection du film de Rachid Bouchareb Little senegal. Avec autant d'attention que pour le film précédent. C'est d'autant plus réjouissant que les conditions de projection n'étaient pas idéales. Nous allons nous améliorer.




Une chanson du Sénégal : Elisabeth Quemeneur a chanté quelques paroles d'une chanson mandingue avant la projection. Le mandingue était un vaste empire africain couvrant trois pays actuels. La voix d'Elisabeth s'enroulant dans la langue de cette partie du monde a rajouté un peu plus de douceur à l'ambiance paisible du restaurant.





Des questions :

Nous avons décidé en début de séance prochaine de voir ensemble quelle leçon de sagesse nous pourrions tirer de ce film.

Car avec ce deuxième film nous achevons notre cycle consacré à l'anniversaire de l'abolition de l'esclavage et nous restons avec quelques points d'interrogation. Par exemple :



-Peut-on se soigner en soignant d'où nous venons, en soignant son origine ? C'est ce que tente de faire Alloune le personnage principal de Little senegal. Qui est un griot. Il tente de relier, de renouer le passé et le présent pour les réconcilier? Mais le film nous montre-t-il sa réussite ou son échec ? La question reste ouverte.

-Y a t-il ou non un rapport entre l'esclavage d'hier et la situation d'oppression dans laquelle vivent les gens? En particulier ceux qui appartiennent à des minorités ?

- La culture traditionnelle peut-elle être un refuge pour assurer une solidarité qui nous manque dans le monde moderne et des valeurs humanistes ? Ou bien est-elle au contraire oppressante ? Dans le film on voit la différence entre Hassan qui bat sa femme. Et Alloune qui l'en empêche. Tous les deux se renvendiquent-ils de la tradition de la même manière ? La question se pose aujourd'hui, où l'on voit que la pression que fait peser le système économique sur les personnes et chacun de nous, détruit les solidarités anciennes. Et nous sommes tentés de revenir à d'antiques sagesses.

Des femmes

On peut aussi essayer de voir comment se situent les femmes du film. Entre Ida l'afroaméricaine intégrée qui nie ses origines. Allein sa pettite fille qui devient enceinte et mère célibataire qui rejette d'abord son enfant. Biram qui subit l'oppresion conjugale traditionnelle de Hassan mais finit par se révolter. Et Amarilis la jeune noire américaine qui prend de l'argent pour un mariage en blanc avec celui dont elle finit par tomber amoureuse.

On peut aussi consulter le dossier que j'ai réalisé sur ce film pour le Centre national du cinéma ici : Dossier little Senegal


Alain


Le film






Réalisé en 2000 par Rachid Bouchareb
1h 38min.

avec Sotigui Kouyate, Sharon Hope, Roschdy Zem



L'histoire :

Passionné par l'histoire de son peuple, Alloune, un vieux guide du musée africain "La Maison des Esclaves" à Gorée, part en pèlerinage pour retrouver les descendants de ses ancêtres aux Etats-Unis. Cet émouvant voyage va le mener des côtes de Caroline du Sud au quartier de Harlem où vit la communauté africaine, Little Senegal.Alloune, animé par l'idée de réunir sa famille par delà les siècles et les frontières, remonte jusqu'à une lointaine cousine, Ida, qui ignore tout de son passé. Le vieil homme croise également les chemins de son neveu Hassan, chauffeur de taxi clandestin, de sa fiancée Biram, d'Eileen, enceinte et fugueuse, et de Karim, qui cherche à faire un mariage blanc pour obtenir la carte verte. Tous les quatre comprennent mal la quête d'Alloune.



Les Intentions de Rachid Bouchareb
"Je me suis interrogé sur les relations qui pouvaient exister enre l'Afro-américains et l'africain, deux siècles après la déportation par les européens de millions d'Africains vers l'Amérique. Que se passe-t-il lorsqu'un Africain, deux cents après, vient dire à un américains noir : "J'ai fait de longues recherches et je vous ai retrouvé, nous sommes de la même famille, nous avons la même terre, les même racines"?


Sotigui Kouyaté : Un fameux acteur de théâtre

Little Senegal est le premier grand rôle au cinéma français de Sotigui Kouyaté, acteur fétiche depuis 1975 du metteur en scène de théâtre Peter Brook. Il joua notamment dans Le Mahabharata qui tourna en France quatre années durant avant de devenir un film en 1989.


La genèse d'un film

Lors de la réalisation de son film Bâton Rouge (1985) aux Etats-Unis, Rachid Bouchareb a eu l'occasion de rencontrer et de se faire des amis dans les communautés africaine et afro-américaine qui vivaient relativement séparées. Surpris par le racisme que les Noirs américains nourrissaient à l'égard des Africains, il décida avec son scénariste Olivier Lorelle d'en faire le sujet d'un prochain film. Mais il dut attendre car l'immigration africaine était à l'époque trop faible pour nourrir son scénario. Le quartier de Little Senegal qui n'existait pas encore est aujourd'hui en pleine expansion.


Filmographie de Rachid Bouchareb




Après l'obtention de son diplôme du Centre d'Etude et de Recherche de l'Image et du Son, il devient assistant réalisateur, puis réalisateur de films pour la télévision (SFP, TF1, Antenne 2) de 1977 à 1984. Durant cette période, il réalise également des courts métrages, dont un, le dernier, Peut être la mer est sélectionné au festival de Cannes en 1983.

Deux ans plus tard, il réalise son premier long, Baton Rouge, qui raconte l'histoire de trois amis qui décident de s'exiler aux Etats-Unis pour trouver du travail. Les thèmes de l'identité, du retour aux racines, de l'immigration servent d'arrière-plan à tous ses films.

N'oubliant pas la télévision grâce à laquelle il a débuté, il continue de réaliser quelques téléfilms parallèlement à sa carrière cinématographique, notamment Les Années Déchirées (TV) (1992) contant le désarroi de deux anciens combattants du FLN vis-à-vis de la mutation algérienne.

Pour son troisième film, il connaît un succès d'estime complètement inattendu. Poussières de vie, l'histoire de Son, fils d'officier noir américain et d'une Vietnamienne, abandonné par son père après le retrait américain du Vietnam en 1975, est nominé pour l'oscar du meilleur film étranger en 1995.



Parfois qualifié de " cinéaste beur ", il refuse cette annotation et prouve, via son rôle de producteur, son ouverture vers d'autres formes de cinéma.Avec son associé Jean Bréhat, avec lequel il a crée les sociétés 3B Production en 1989 et Tadrat Films en 1997, il produit des films de différentes nationalités, notamment albanais comme Kolonel Bunker ou vietnamien tel que Gardien de buffles. Il a également produit tous les films de Bruno Dumont, de La Vie de Jésus sorti en 1996 à Flandres dix ans après, visible sur les écrans la même année que sa dernière réalisation Indigènes .


Indigènes avec Jamel Debbouze, Roschdy Zem (qu'il avait déjà dirigé par le passé, notamment dans Little Senegal, son précédent film), Sami Bouajila, Samy Naceri et Bernard Blancan, tous les cinq récompensés par un prix d'interprétation collectif lors du dernier festival de Cannes

1 commentaire:

Unknown a dit…

Une bonne séance avec de l'écoute, je trouve les questions intéressantes. Je pense que l'on peut se "soigner" physiquement et psychologiquement en se réconcilaiant avec ses origines, en acceptant l'enfant que l'on a été et en prenant conscience que l'on peut stopper des répétitions dans une famille.( psychogénéalogie)
Par contre je suis plus nuancée sur le rôle du griot par rapport à la jeune fille qui veut abandonner son enfant.Même si, sur le fond il dit des choses justes, je pense que c'est une décision qui la regarde elle et non sa famille.
Voilà de quoi relancer le débat, merci à Alain pour la qualité des interventions Betty